Parlons affaires...

Un garçon s'inclina et ouvrit le chemin jusqu'à un salon privé. Nico le suivit sans rien dire, avec toute son élégance et sa tenue qui s'accordaient à merveille à l'endroit. Le restaurant panoramique était un de ses lieux publics préférés. Sûrs et discrets, le personnel et la qualité se portaient hors des critiques à chacune de ses visites et le jeune mafieux appréciait quand bien même il ne le montrait pas.

S'asseyant enfin à sa table, entendant la porte de la salle se refermer, il prit quelques secondes pour apprécier la sérénité de l'endroit. Elle faisait du bien. Depuis quelques jours, un vent nouveau et violent semblait souffler sur la ville. Ce n'était pas pour dérangé Nico que le traintrain habituel ennuyait, mais ça commençait à faire un peu trop.

Il y avait d'abord l'arrivée de son cadet en ville. Un Tatsuya totalement inexpérimenté et encore terriblement vulnérable dans le milieu mafieux. Puis Arkalya qui s'immisçait en Nico et commençait à s'en rapprocher au point que le yakusa considérait d'accepter une amitié. Et enfin, dernier problème en date, il y avait Vaëm. Nico l'avait déposé au club, le confiant à quelques gardes jusqu'à ce qu'il puisse en parler à Kioshi. Il fallait qu'il le fasse avant peu…

Soupirant, il se redressa quand un serveur entra, lui présentant une carte de menus. Le regard froid dériva sur les plats à disposition. Nico n'avait pas le cœur à ça, mais il savait qu'il devait faire comme si de rien n'était. Ici, le paraître comptait plus que l'être et le moindre indice sur une quelconque faiblesse suffisait à sombrer en enfer.

Le jeune mafieux n'avait pas envie de travailler et pourtant il attendait quelqu'un. On ne lui avait pas dit qui et il n'avait pas eu le temps matériel pour se renseigner. Son combat avec Vaëm l'avait fatigué et il avait passé un petit moment à se remettre et surtout à faire recoudre son bras. Nico allait devoir jouer la comédie et prétendre connaître son visiteur…Enfin l'autre ne pourrait pas entrer sans se faire annoncer et donc présenter. Il saurait au moins ses nom et prénom.

Se tenant prêt, l'héritier Sawada effaça définitivement toutes traces d'expression de son visage et se fondit totalement dans son rôle. Il était le conseiller personnel de son père et l'aîné des fils de la famille Sawada, concrètement donc la troisième personne la plus influente de la ville…enfin…ça c'était encore à voir, mais le temps n'était pas aux doutes. La stature parfaite, il attendit qu'on introduise son futur interlocuteur.

Nico avait attendu un moment, mais il était patient, c’était une chose qu’il avait apprise durant sa captivité. En plus, l’attente lui permettait de clarifier ses pensées et d’être parfaitement prêt pour cette rencontre.

« Yoru Yamada. »

La voie atone du serveur fit à peine réagir Nico, lui faisant légèrement dévié son regard. Il fixa l’homme qui entra. Lorsqu’il fit une révérence, Nico ne broncha pas, mais il fit plus attention à son comportement. Cet homme était dangereux et ne le cachait même pas. Entendant la question, il répondit ferme.

« Rassurez-vous. »

Voyant que l’autre regardait la carte, l’héritier Sawada commanda directement pour lui-même. Il ne s’était pas embarrassé de fioriture et avait pris un plat raffiné sans l’être trop. Il trouvait stupide de montrer sa puissance par une telle démonstration.

Le regard menaçant faillit faire sourire Nico et l’amusa un instant. L’autre savait bien jouer, les négociations allaient être intéressantes. Se concentrant sur les paroles, il nota les détails qui lui manquaient. Un tueur à gage hein ? Qui venait d’arriver qui plus est. Attendant que le garçon sorte, le jeune yakusa croisa ses mains en-dessous de son menton.

« Comme vous ? Yamada-san ? »

Il ne déployait aucune menace ni supériorité. Ils étaient seuls dans une pièce, deux mafieux de la même carrure. Nico n’allait pas se rabaisser à être méprisant ou à sous-estimer ce tueur. Les plats arrivèrent bientôt et le jeune yakusa hocha la tête pour faire partir à nouveau le serveur.

« Que cherchez-vous ? »

Demander et écouter d'abord. C'était une tactique de sécurité de ne pas s'avancer et de laisser parler l'autre.

La demande fit réagir Nico qui arrêta momentanément de poser des questions, prenant comme prétextes de gouter à son plat. Ses yeux quittèrent le visage de Yoru, mais lui-même calculait comment il allait pouvoir continuer. Il était assez confiant en soit, mais ne pouvait se permettre de paraître désorienté ou faible. Le tueur avait l’air intelligent et observateur, c’était un point de plus pour lui.

Doucement, le téléphone du jeune yakusa vibra. Le sortant, les yeux bleus parcoururent rapidement le message sans que son visage n’exprime quoique ce soit. Intérieurement, il était soulagé, il allait pouvoir négocier à armes égales.

« Veuillez m’excuser pour cette interruption. Concernant votre recherche, je pense pouvoir la satisfaire, mais je parlais plutôt des conditions. »

Retournement de veste. Voilà à quoi servait le peu de paroles, celles qui avaient été dites étaient facilement manipulables. A la mention de Tatsuya, Nico qui allait boire retint son mouvement. Brièvement presque invisiblement, puis il but une gorgée. Il n’avait pas eu le temps de s’informer encore une fois…et là il n’avait donné aucun ordre de le renseigner.

« Mon frère va bien, je vous remercie. Vous l’avez un peu perturbé hier, mais il se remet. »

Tatsuya était parti effectuer sa mission et Nico n’avait eu encore aucun contact. Il supposait simplement la réaction de son cadet…face à un homme tel que Yoru ce ne devait pas être aisé à imaginer. Repoussant son plat, il joua avec le verre et continua :

« Les tueurs à gage deviennent courants par ici et ne sont souvent que de petites frappes ou des traître. Aussi, vous excuserez ma méfiance, Yamada-san. Mais vous avez apparemment disparu de la circulation du réseau mafieux…Cela laisse la porte ouverte à des doutes. »

La base de donnée Sawada n’avait pu retrouver la fiche de ce tueur alors même qu’elle était parfaitement visible quelques jours plutôt. Nico venait de l’apprendre et son regard jusqu’alors calme se fit un peu plus froid.

L’atmosphère de la pièce était restée assez légère durant tout le repas, ce qui pouvait paraître étrange pour un rendez-vous entre mafieux. Jouant avec le bord de son verre sans toutefois faire du bruit, Nico écouta Yoru, plus par politesse qu’autre chose. Il avait déjà pris sa décision.

Un détail l’ennuyait cependant. Que ce tueur à gage ait voulu se protéger, c’était normal, mais comment avait-il su que les Sawada possédaient un dossier sur lui ? Et surtout, il n’y avait pas beaucoup de personnes qui étaient assez habiles pour parer à toutes les défenses de leur système. Y aurait-il une taupe dans leur famille ?

Le sourire joueur lui confirma ses pensées, mais il ne s’aventura pas à le renvoyer. Sans interrompre, il écouta les trois règles qu’il connaissait déjà et qu’il appliquait plus ou moins. Se levant sans bruit, utilisant sans vraiment y prendre garde ses habitudes de voleur, Nico alla s’asseoir sur un des fauteuils qui garnissaient la salle puis répondit :

« Les données informatiques vous concernant ont disparus, mais pas le bouche-à-oreille, ni votre réputation… »

Le jeune mafieux réfléchit encore un instant. Il n’appréciait pas que Yoru ait rencontré Tatsuya. Ses frères étaient l’une des seules faiblesses de l’héritier Sawada et il s’en voulait d’avoir été surpris juste avant. Regardant enfin Yoru, il planta ses pupilles froides et sûres d’elles dans ceux de son futur employé.

« Nos rendez-vous se feront au lieu que je vous ferais indiquer. Je ou un autre vous transmettrai l’identité de votre travail. Il n’y aura pas de trace écrite ni orale. Et je vous demande, Yamada-san, de ne plus faire manipuler notre système. Ou ayez la décence d’employer une personne extérieure. »

La dernière phrase n’avait été qu’un test, mais Nico était presque sur de lui. Ses conditions étant posées, il continua de fixer le tueur, attendant une réponse. Il n’y avait qu’une condition réelle, le Sawada ne savait que trop bien qu’on n’attachait pas ces gens-là, ils changeaient d’employeur au gré de leur intérêt. C’était à ces derniers de s’assurer que rien ne les trahirait jamais.

« Le salaire sera remis de la même manière. Moitié avant, moitié après. »

Un serveur entra et se mit à débarrasser la table avec dextérité. Peu après, il regarda Nico qui hocha la tête silencieusement avant de demander à son invité :

« Vous prendrez un café ? Yamada-san ? »

Avait-il précisé que Yoru avait intérêt a accepté s’il voulait son premier emploi ? Non…Nico voulait voir jusqu’où allait l’expérience de ce tueur. Lui-même était encore jeune, mais pas assez stupide pour fanfaronner et mépriser Yoru.

La réponse de Yoru satisfit Nico. Néanmoins, le point reprit lui fit regarder le tueur avec un regard calculateur. C'était possible qu'il ait utilisé quelqu'un d'extérieur, mais il n'y avait pas mille personnes capables d'autant de brio. Elles se comptaient sur les doigts d'une main, et la famille Sawada en possédait deux…Mentalement, Nico se promit de vérifier tout ça. Il ne s'excusa pas de l'accusation, il n'avait pas à le faire, c'était un simple doute exprimé. Mais il ne put s'empêcher de rajouter une pique :

" Vous pouvez utiliser à loisir les informations que vous avez à disposition, tant que vous ne les changez pas. C'est votre choix."

Voyant la distance mise entre eux deux, le jeune Sawada sourit intérieurement. Ce tueur savait bien calculer. L'arme favorite de Nico était le couteau ou le poignard, il en avait toujours un ou deux sur lui. Mais à cette distance, l'autre aurait le temps d'éviter le jet. Son expérience était donc réelle. Sitôt de retour, un nouveau fichier serait construit, et Nico notait tout ce qui pourrait être utile à sa rédaction.

Que le café soit accepté ne fit qu'entériner cette idée, Yamada était ce qu'il prétendait être, du moins en partie. Attendant l'arrivée du garçon, le yakusa pianota sur son téléphone. Il prit ensuite également sa tasse, mais se garda bien d'en boire immédiatement. Nico eut un sourire froid à la question. Tournant la tasse entre ses mains, il répondit :

" Pour satisfaire votre nouvel employeur, il vous suffira d'exercer correctement votre métier sur cette personne."

Sa main tendit le téléphone de manière à ce que Yoru puisse voir le nom qui y était marqué. Nico resta dans cette position le temps que le tueur puisse mémoriser les informations puis effaça ce qu'il avait écrit. Pas de traces.

Il avait volontairement appuyé sur le singulier. Nico travaillait pour la famille Sawada et personne d'autre, il en était de même pour Yoru. Les tentatives déstabilisatrices, le jeune conseiller connaissait, il avait dû en affronter pleins dans la lutte au pouvoir qu'il avait mené. Il n'aimait pas son rôle, il n'aimait pas devoir être celui qu'il était, mais il assumait. Ce n'était pas l'aîné Sawada qui parlait, mais l'héritier, celui qui avait dû trouver sa place en se battant, comme les autres. Avec un léger avantage.

C'était une erreur de le confondre avec Tatsuya. Sans pitié et sans émotion apparente, Nico continua la sentence qui allait abréger la vie d'un des anciens professeurs de son frère. Il n'avait pas pardonné celui qui avait osé faire plonger son cadet dans la drogue.

" Je vous prie d'œuvrer avec toute la délicatesse possible."

En gros, qu'il souffre le plus possible. Ce dealer encore assez connu avait ennuyé suffisamment Nico qui détestait la drogue. Jusqu'alors il avait respecté l'ordre de son père et toléré le marché…mais qu'on en prenne à son cadet, c'était trop. Il l'aurait tué de ses propres mains s'il n'était pas l'héritier de la mafia.

Nico regarda Yoru froidement lorsqu’il fit ses remarques, ce n’était pas à lui de dire ça. Le jeune mafieux avait été sensible sur le * soyez plus présent* Comme s’il pouvait se le permettre. Il ne devait pas montrer qu’il tenait à ses frères, de risque de les metre en danger, ni trop les fréquenter de peur de perdre son autorité. Voilà pourquoi il n’aurait jamais voulu être un Sawada. Mais il ne montra rien, se contentant d’afficher un petit sourire.

« Je n’ai pas à vous répondre su mes intentions, mais sachez qu’il ne s’agit nullement de protection. J’ai parlé avec mon frère et il sait à quoi s’en tenir au sujet de la drogue. »

Le regard de Nico se fit un peu plus sévère inconsciemment. La discussion avait été houleuse, surtout pour Tatsuya qui n’avait pas redit grand-chose. L’héritier Sawada était conscient qu’il devait laisser ses frères se débrouiller tout seul et grandir à leur rythme, le problème n’était pas là.

« C’est un retour mérité. Il était chargé de son éducation, pas de l’influencer alors qu’il n’était qu’un enfant. »

Franchement. Donner de la drogue à un gamin de treize ans…était-ce faire preuve de loyauté envers la famille Sawada ? Pas pour Nico. De plus, il n’allait pas tuer tous les dealers, juste celui-ci. Tatsuya devait s’en sortir seul, par sa propre volonté.

« Je fais ça pour la mafia, Yamada-san. Mon frère n’est que secondaire. Et cette mort me convient parfaitement. »

Sa voix avait été froide, mais très sérieuse. Nico, malgré tout son amour pour ses frères faisait passer la mafia avant. La punition qu’il avait reçue en faisant le contraire lui avait suffis. Il ne refusait qu’une chose, voir ses cadets disparaître. Tout en parlant, il avait aussi dresser en lui les raisons qu'il allait devoir donner à son père...

Nico soupira, sachant que Yoru avait raison. Malgré tous ses efforts, il n’arrivait pas à considérer ses frères autrement. Et pourtant…il avait même été jusqu’à ne plus les voir, ne les surveiller que de loin, être détesté par eux, il avait tout essayé.

Se levant à son tour, ne notant que légèrement la révérence - il était trop habitué – il accepta de serrer la main du mafieux. Que risquait-il ? Il portait en permanence des gants en cuir, empêchant ainsi ses traces digitales d’être prise. Et son autre main s’était par habitude positionnée tout prêt du couteau dissimulé à sa hanche.

L’attaque fit mal à Nico, mais il se contint. Cet homme était plus vieux que lui et était plus expérimenté. C’était comme lorsqu’il devait parler avec son père. Son visage qui avait affiché une légère crispation se détendit dès qu’il eut fait ce raisonnement. Ne répondant pas tout d’abord, il planta son regard devenu glacial dans celui du tueur.

« Je transmettrais le message aussi rapidement que possible, Yamada-san. »

La deuxième attaque toucha au même endroit, creusant l’impact déjà laissé par l’autre. Nico eut un sourire douloureux. Il ne savait pas vraiment comment réagir. Ne rien dire, c’était laissé croire à l’autre qu’il avait gagné, répondre, c’était admettre une faiblesse. Alors il biaisa, retournant le coup pour à son tour avoir des informations :

« Vous semblez bien connaître ce sentiment Yamada-san. Je suppose que dire les raisons qui m’ont poussé à m’éloigner de mes frères trouveront un certain écho en vous. »

Il avait admis une certaine faiblesse seulement parce que l’autre l’avait de toute manière déjà découverte. Se coulant silencieusement vers la fenêtre, il dévisagea son interlocuteur. L’ombre dans laquelle il s’était un peu réfugié dissimulait la douleur que rendaient ses pupilles. Lentement, il prononça les mots qu’il se devait de prononcer par loyauté pour son père, mais qu’il le blessait tant.

« Mais rassurez-vous, c’est bien de la mafia dont je parle. Cet homme commence à en savoir trop, à être trop lié à nous et il est trop instable pour que nous acceptions la possibilité de le gader. »

C’était comme admettre que sa punition l’avait totalement maté, qu’il n’y avait plus que la mafia qui comptait pour lui, qu’il était devenu une machine au service de son père.

Nico se rapprocha de Yoru, le visage à nouveau lisse de toutes émotions. Il ne devait pas plus se dévoiler, le tour qu'avait pris cette conversation devenait dangereux. Les paroles lui donnèrent un goût de déjà-vu...Arkalya avait dit sensiblement la même chose. Par contre la mention de sa loyauté fit rire Nico. Le rire froid franchit ses lèvres facilement, comme retenu depuis quelques temps déjà. Lui ? Ne jamais trahir le clan ? Ou son père ? Mais il l'avait déjà fait une fois...

Nico se repris pensant qu'au moins, il savait que ce tueur n'avait aucune information tangible sur lui. C'était intéressant à savoir, on lui refusait donc des informations sur les Sawada...Lentement, d'une voix qui était devenue posée, Nico rétorqua :

" Comment voulez-vous vous éloigner quand vous n'avez jamais été là ? De toute manière, les choses sont en cours d'arrangement et je compte bien continuer. J'ai eu l'exemple d'un hôte dévasté, Arkalya je crois, ça a suffit à me réveiller."

L'héritier Swada ne mentait pas. Il avait déjà prouvé à son cadet qu'il tenait à lui, il fallait construire leur relation à présent...mais il ne voulait pas voir Tatsuya dans le même état qu'Arkalya le soir d'avant...L'affirmation le fit sourire et il répondit :

" N'usez pas votre salive ainsi Yamada-san. Votre fidélité prendra tout son sens si vous arrivez à la conserver. Petit détail, ne tuez pas mes hommes de main. Ils vont vous suivre un petit moment. Simple mesure de sécurité."

Il se comportait comme si cette conversation n'avait jamais eu lieu. Mais le tueur pouvait être fier de lui car réussir à percer la carapace de Nico Sawada au premier rendez-vous n'était pas chose aisée...ou peut-être était-il juste tombé au moment où Nico était le moins stable ?

Nico haussa un sourcil en voyant la réaction de Yoru. Il ne s'y attendait vraiment pas...et était presque désolé pour son employé. Le tueur semblait avoir perdu le beau calme qu'il arborait et tout cela indiqua à Nico où il allait devoir fouiller pour trouver les faiblesses de cet homme. Si ça s'avérait vrai que Yoru et Arkalya était lié, Yoru obtiendrait une garantie de vie...Nico ne voulait pas perdre ce qu'il était entrain de créer avec l'hôte. Sa première amitié, il voulait essayer.

Il se récria à la phrase de Yoru, mais en même temps fut assez content, cela orouvait qu'il savait finalement assez bien se dissimuler.

" Mon comportement a changé, Yamada-san. Vous avez dû comprendre à quel point je tiens à mes frères, si j'étais celui qui détruisait Tastuya, je préférerais me tuer. Nous avons parlé et réduis un peu la distance."

Il ne savait pas pourquoi il se justifiait. Mais Nico faisait réellement des efforts avec son frère. Que Yoru veuille s'en aller lui semblait normal, surtout s'il avait touché un point sensible. Nico en avait suffisamment appris et savait ce que devait ressentir le tueur. Ce dernier le lui avait fait subir juste avant.

" Bien sûr. Mes hommes resteront à l'écart et ne vous dérangerons pas. Quant à votre appartement, il resteront tout simplement au bas de l'immeuble. Pas de fouille, pas de micro. Je me suis assez dévoilé pour devoir vous faire confiance."

Son regard avait rattrapé celui de Yoru et était glacial. Il n'était pas homme à admettre les trahisons. Si Yoru voulait cesser de travailler à son service, il accepterait. Mais que ce dernier tente de détruire la mafia et il serait bien accueillit. Dans ce genre de cas, Nico n'essayerait même pas de tuer l'autre ou alors avec des renforts. Non. Il s'arrangerait seulement pour que Yoru ne trouve plus de travail et soit capturé par la police.

" Je vous en prie Yamada-san. J'espère que notre collaboration durera."

Ses pupilles s'ancrèrent dans les yeux du tueur et y restèrent un moment. Calculatrices et dangereuses. Il ne voulait pas que Yoru pense que sa faiblesse suffisait à le mâter. Nico avait d'autres ressources. Puis il se détourna et sortit son couteau de son dos pour jouer avec. Ça le distrayait alors qu'il n'avait plus qu'une envie, dormir. Son bras se rappelait à lui maintenant que les anti-douleurs prenaient fin.

Nico hocha la tête, acquiesçant. Effectivement, ses hommes le préviendraient, puis laisseraient Yoru tranquille. C'était juste pour constater si sa méthode de travail était exemplaire. La révérence le fit grimacer, mais juste le temps où le tueur ne pouvait pas le voir. Nico trouvait dérangeant de voir un homme tel que Yoru s'incliner devant lui, mais c'était considéré comme normal.

Alors que l'homme s'apprêtait à sortir, Nico le vit faire un mouvement brusque et sortir une arme. Intérieurement, il sourit, ce tueur avait de beaux réflexes. Et il tenait à vivre. Deux informations supplémentaires.

" Ne vous excusez pas, la réaction prouve votre vigilance."

Il sourit un peu sarcastiquement, mais en réalité il avait classé Yoru dans les gens dangereux mais respectables. Sa confiance, il l'avait accordée avec une certaine limite. L'héritier Sawada, pour sa survie, ne pouvait se reposer sur personne...mais il y avait des nuances à tout, n'est-ce pas ?

" Je vous souhaite un bon retour."

La formule de politesse classique, mais indispensable. Sitôt Yoru partit, Nico s'effondra dans un fauteuil et ferma les yeux. Ça s'était fait. Appelant un serveur, il commanda un verre d'énergisant, la tête recommençant à lui tourner. Un quart d'heure après Yoru, Nico sortit à son tour, ne laissant pas du tout apparaître dans son comportement qu'il venait de commander la mort d'une personne.